Source : Rapport officiel 2004 sur www.miviludes.gouv.fr

Gothisme et satanisme

La MIVILUDES a été conduite à s’interroger sur le gothisme et le satanisme. Une première synthèse des informations collectées au cours de l’année révèle en effet une progression sensible des dérives satanistes en France qui ont pu se manifester dans un certain nombre de profanations. Cette réalité a conduit la Mission à diffuser quelques conseils de prudence sur son site afin d’alerter le public sur la dangerosité potentielle d’une mouvance très présente sur le réseau Internet et qui, pour recruter de nouveaux adeptes, profite de la vague gothique, posture esthétique très « tendance », particulièrement en faveur chez les adolescents. On assiste aussi à l’émergence de micro groupes « hybrides » aux attaches multiples et aux obédiences mal affirmées. Leurs adeptes sont pour la plupart des jeunes en déshérence et en rupture avec le milieu scolaire ou professionnel, souvent victimes d’un passé violent marqué par l’absence de repères familiaux fiables et sécurisants. Ils opèrent dans leurs options idéologiques, une sorte de syncrétisme entre satanisme, nihilisme et idéologie néo-nazie pour justifier leurs actes. Comme en Amérique du sud où il se propage dans des proportions très inquiétantes, le satanisme semble gagner du terrain en Europe. En Italie, où séviraient d’après les pouvoirs publics plus d’un millier de ces groupes occultes, un procès vient de se tenir suite à plusieurs meurtres d’adeptes, notamment l’assassinat d’une jeune femme au sein d’un groupe d’adolescents, dans le cadre d’une cérémonie rituelle dédiée à Satan. Outre les pays scandinaves et l’Allemagne, l’Espagne, la Russie, la Grèce et la Pologne, n’échappent pas à ce mouvement de radicalisation. A noter qu’en Russie, un département spécial a été créé au sein du ministère de l’intérieur pour lutter contre le phénomène. En France, le suicide en 1995 des deux dirigeants de la branche française de la WICCA internationale a affaibli le mouvement, au point qu’il n’existe plus à l’heure actuelle de structures « officielles » actives sur le territoire national.

Cela ne signifie pas pour autant que la mouvance satanique ait disparu. Plus diffuse, celle-ci est d’abord présente sur le réseau Internet, via des sites personnels se réclamant de la WICCA, des enseignes commerciales directement liées à la mode du gothisme et des maisons de production spécialisées dans le black metal, l’une d’elles possédant ainsi plus de quatre mille références de titres fortement imprégnés de thèses sataniques. Sur le terrain, elle est incarnée par quelques individualités évoluant au sein de groupes informels, réunis quelquefois seulement le temps d’une soirée, mais partageant un socle de valeurs communes (telles des références anti-chrétiennes et anti-républicaines, de mêmes goûts musicaux, des pratiques sexuelles déviantes, un goût prononcé pour la magie et/ou le vampirisme). Chez ces jeunes gens, l’adhésion au satanisme est très souvent vécue comme une étape initiatique, un désir de se mettre à l’épreuve par la transgression des normes sociales. Un certain nombre de cas de profanations de cimetières peuvent d’ailleurs relever de cette logique, ces dernières étant dès lors vécues comme une étape indispensable à l’intégration du jeune adepte dans le clan.

Dans le sud de la France, on a noté que les adeptes utilisent principalement pour se donner rendez-vous, la technique des « flyers » (invitations sur papiers volants) et le réseau Internet ; ils n’hésitent pas à trouver refuge en Espagne en cas de difficultés. Ils franchissent ainsi très fréquemment la frontière pour organiser en Catalogne des « rave-parties » ou « free-parties » au cours desquelles ils peuvent s’adonner plus librement à leurs rituels.
Dans l’est, on a pu relever des connexions à la mouvance néo-nazie. On note enfin l’existence de quelques groupes problématiques à Paris et en région parisienne, notamment. La plupart du temps, ces derniers sont constitués de dix à vingt personnes, souvent des jeunes majeurs de 18 à 20 ans, mais quelquefois aussi des mineurs, dès 15 ans. Ces adeptes se réunissent sous l’égide d’un leader plus âgé qui tire le plus souvent sa légitimité d’un éventuel passé judiciaire ou d’attaches proclamées à la Fédération internationale sataniste.

Satanisme et criminalité

Pour qu’un acte criminel ou délictuel, ou encore un suicide, soit clairement identifié comme sataniste, il doit présenter des indices suffisamment probants, empruntés à « l’imagerie » et aux rituels sataniques (inscriptions anti-chrétiennes, croix renversées, pentagrammes, chiffres démoniaques etc..).
Si l’on se réfère à ces critères d’identification, on peut raisonnablement parler d’une progression sensible du phénomène. Les services de police et de gendarmerie font ainsi état d’une augmentation significative des profanations de cimetières clairement identifiées comme sataniques : 23 faits de janvier à août 2004 (huit mois) contre 18 sur toute l’année 2003.
Les morts violentes reliées au phénomène sataniste sont encore heureusement très limitées. On déplore toutefois en 2003 et 2004 deux suicides et deux meurtres susceptibles de lui être rattachés.

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